Civ. 2e, 12 octobre 2023, n°22-13.759, publié au Bulletin
Cet arrêt concerne un contrat d’assurance « multirisque professionnel » incluant une garantie « protection financière, mise en jeu après la publication, le 15 mars 2020, de l’arrêté portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus Covid-19, qui a édicté notamment l’interdiction pour les restaurants et débits de boissons d’accueillir du public du 15 mars 2020 au 15 avril 2020.
Selon l’article 1131 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, “l’obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet“. (A noter que le nouvel article 1169 du Code Civil institué par ce texte a remplacé l’ancien article 1131, et dispose désormais qu’un contrat à titre onéreux est nul lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s’engage est illusoire ou dérisoire).
Il résulte de l’article L 113-1 du code des assurances que les clauses d’exclusion de garantie qui privent l’assuré du bénéfice de la garantie en considération de circonstances particulières de la réalisation du risque doivent être formelles et limitées.
Sur le fondement de ce dernier texte, la Cour de cassation juge qu’une clause d’exclusion n’est pas limitée lorsqu’elle vide la garantie de sa substance, en ce qu’après son application elle ne laisse subsister qu’une garantie dérisoire (2e Civ., 1er décembre 2022, pourvois n° 21-19.341, n° 21-19.342, n° 21-19.343, n° 21-15.392, publiés au Bulletin ; 2e Civ., 19 janvier 2023, pourvoi n° 21-21.516, publié au Bulletin).
Il en résulte que la validité des clauses d’exclusion de garantie, régie par ce texte spécial qui exige qu’elles ne vident pas la garantie de sa substance, ne peut être cumulativement examinée au regard de l’article 1131 du code civil.
Or, pour réputer non écrite la clause d’exclusion de garantie et condamner l’assureur à payer une provision, un arrêt retient :
- d’abord, que cette clause est formelle et limitée au sens de l’article L. 113-1 du code des assurances, et qu’elle ne peut être réputée non écrite ou inopposable à ce titre.
- qu’il se déduit de l’article 1131 du code civil, qu’est réputée non écrite la clause limitative de réparation, ou de garantie, qui contredit la portée de l’obligation essentielle souscrite par le débiteur.
- que d’une part l’obligation essentielle contractée par l’assuré était une garantie des pertes d’exploitation causées par une fermeture administrative pour épidémie, et d’autre part, que la clause litigieuse, en réduisant la garantie au cas infinitésimal d’une fermeture administrative pour épidémie imposée au seul assuré pour tout le département, la vide de sa substance.
En statuant ainsi, après avoir jugé que la clause d’exclusion de garantie était formelle et limitée, sur le fondement de l’article L. 113-1 du code des assurances, la cour d’appel a violé, par fausse application l’article 1131 ancien du Code civil.