1. Point de départ de la prescription en matière civile
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000044482872?init=true&page=1&query=20-21439&searchField=ALL&tab_selection=all
Cass. Civ. III, 8 décembre 2021, 20-21439
Selon l’article 1648 du Code Civil : l’action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l’acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice.
Aux termes de l’article 2224 du même Code, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Enfin, selon l’article 2232, le report du point de départ, la suspension ou l’interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit.
Il est de jurisprudence constante qu’avant la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, la garantie légale des vices cachés, qui ouvre droit à une action devant être exercée dans les deux ans de la découverte du vice, devait également être mise en œuvre à l’intérieur du délai de prescription extinctive de droit commun.
L’article 2224 du code civil, qui a réduit ce délai à cinq ans, en a également fixé le point de départ au jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer, ce qui annihile toute possibilité d’encadrement de l’action en garantie des vices cachés, le point de départ de la prescription extinctive du droit à garantie se confondant avec le point de départ du délai pour agir prévu par l’article 1648 du même code, à savoir la découverte du vice.
En conséquence, l’encadrement dans le temps de l’action en garantie des vices cachés ne peut être assuré, comme en principe pour toute action personnelle ou mobilière, que par l’article 2232 du code civil qui édicte un délai butoir de vingt ans à compter de la naissance du droit.
Le droit à la garantie des vices cachés découlant de la vente, l’action en garantie des vices cachés doit donc être exercée dans les deux ans de la découverte du vice, sans pouvoir dépasser un délai de vingt ans à compter du jour de la vente (3e Civ., 1er octobre 2020, pourvoi n° 19-16.986, en cours de publication).
2. Point de départ de la prescription en matière de vente commerciale
Toutefois, en matière commerciale, la première Chambre Civile de la Cour de cassation a estimé que la garantie des vices cachés doit être intentée avant l’expiration du délai de 5 ans prévu à l’article L110-4 du code de commerce (de 5 ans aujourd’hui), dont le point de départ se situe au jour de la vente, et non celle du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer : (Cass. Civ . I, 6 juin 2018, 17-17438)
“La cour d’appel a retenu, à bon droit, que le point de départ du délai de la prescription extinctive prévu à l’article L. 110-4 du code de commerce, modifié par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, courait à compter de la vente initiale, intervenue le 18 mars 2008, de sorte que l’action fondée sur la garantie des vices cachés, engagée les 9 et 10 février 2016, était manifestement irrecevable, l’action récursoire contre le fabricant ne pouvant offrir à l’acquéreur final plus de droits que ceux détenus par le vendeur intermédiaire”.
De son côté, la chambre commerciale de la Cour de cassation a confirmé, que l’action en garantie des vices cachés devait être intentée à la fois dans un délai de 2 ans à compter de la découverte du vice, mais également dans le délai de l’article L110-4 du code de commerce, qui court, lui, à compter de la date de la vente (Cass. Com, 16 janvier 2019, n°17-21477).
“L’action en garantie des vices cachés, même si elle doit être exercée dans les deux ans de la découverte du vice, est aussi enfermée dans le délai de prescription prévu par l’article L. 110-4 du code de commerce, qui court à compter de la vente initiale, ce dont il résultait que, les plaques de couverture ayant été vendues et livrées en 2003, l’action engagée par la société Vallade Delage le 29 juillet 2013, était prescrite”.
3. Report du point de départ de la prescription en cas de vente intermédiaire
Toutefois, si le recours du vendeur intermédiaire contre le vendeur initial est bien soumis au délai de l’article L110-4 du code de commerce, ce délai ne commence à courir qu’à compter du jour où le vendeur intermédiaire est assigné par l’acheteur final (Cass. Civ III, 6 décembre 2018, n°17-24111).
“Qu’en statuant ainsi, alors que le délai dont dispose l’entrepreneur pour agir en garantie des vices cachés à l’encontre du fabricant en application de l’article 1648 du code civil court à compter de la date de l’assignation délivrée contre lui, le délai décennal de l’article L. 110-4 du code de commerce étant suspendu jusqu’à ce que sa responsabilité ait été recherchée par le maître de l’ouvrage, la cour d’appel a violé le texte susvisé”.
A noter enfin qu’en matière de marchés publics, si la garantie des vices cachés prévue par le code civil est applicable aux marchés publics de fourniture, il a été jugé que “l’article L110-4 du code de commerce n’est pas applicable aux obligations nées à l’occasion de marchés publics” (CE, 7 juin 2018, n°416535).
4. Prescription et forclusion
Cass. Civ. III, 05 janvier 2022, 20-22670
https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20220105-2022670
Il résulte de l’article 2220 du code civil que les dispositions régissant la prescription extinctive ne sont pas applicables aux délais de forclusion, sauf dispositions contraires prévues par la loi.
La suspension de la prescription prévue par l’article 2239 du code civil n’est donc pas applicable aux délais de forclusion (3e Civ., 3 juin 2015, pourvoi n° 14-15.796, Bull. 2015, III, n° 55).
Dès lors, le délai de deux ans dans lequel doit être intentée l’action résultant de vices rédhibitoires, prévu par l’article 1648 du code civil, est un délai de forclusion qui n’est pas susceptible de suspension, mais qui, en application de l’article 2242 du même code, peut être interrompu par une demande en justice jusqu’à l’extinction de l’instance.
En l’espèce, ayant retenu que ce délai de forclusion, qui avait commencé à courir le 11 décembre 2012, avait été interrompu par l’assignation en référé du 28 mai 2013 jusqu’à l’ordonnance du 24 juillet 2013, elle en a exactement déduit qu’à défaut de nouvel acte interruptif de forclusion dans le nouveau délai qui expirait le 24 juillet 2015, Mme [R] était forclose en son action fondée sur la garantie des vices cachés.
La Cour de cassation avait d’ailleurs d’ores et déjà affirmé que la suspension prévue à l’article 2239 du Code civil n’était pas applicable aux délais de forclusion (Cass. Civ. III, 3 juin 2015, n° 14-15.796.).