Cour d’Appel de Lyon, Arrêt du 11 avril 2019 (François / Monsanto)
Exposant avoir été intoxiqué par les vapeurs d’un herbicide alors commercialisé sous le nom de “Lasso” par la société Monsanto lors de l’ouverture d’une cuve de traitement sur un pulvérisateur, un céréalier, a assigné cette société afin de la voir déclarer responsable de son préjudice, à titre principal, sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil, à titre subsidiaire, sur celui des articles 1147 et 1165 du même code.
Un jugement a accueilli cette action et ordonné une expertise médicale.
Par arrêt du 10 septembre 2015, la Cour d’Appel de Lyon a confirmé le jugement ayant retenu la responsabilité de cette société sur le fondement des articles 1382 et suivants du code civil en retenant que cette société avait failli à son obligation d’information et de renseignement, en omettant de signaler les risques liés à l’inhalation de monochlorobenzène présent en quantité importante dans le Lasso et de préconiser l’emploi d’un appareil de protection respiratoire, notamment pour le nettoyage des cuves.
Sur pourvoi de la société Monsanto, et par arrêt du 7 Juillet 2017, la Chambre Mixte a estimé que si le juge n’a pas, sauf règles particulières, l’obligation de changer le fondement juridique des demandes, il est tenu, lorsque les faits dont il est saisi le justifient, de faire application des règles d’ordre public issues du droit de l’Union européenne, telle la responsabilité du fait des produits défectueux, même si le demandeur ne les a pas invoquées.
Alors, d’une part, que la victime alléguait avoir acheté le produit ayant causé le dommage en avril 2004 à une coopérative agricole, qui l’avait acquis deux ans plus tôt de la société Monsanto, ce qui rendait possible que cette dernière en ait été le producteur et avait pour conséquence que la date de mise en circulation de ce produit, qui ne saurait résulter de la seule autorisation de mise sur le marché, pouvait être postérieure à la date d’effet de la directive du 25 juillet 1985, et que d’autre part, elle imputait l’origine de son dommage à l’insuffisance des mentions portées sur l’étiquetage et l’emballage du produit, la Cour d’Appel était tenue d’examiner d’office l’applicabilité au litige de la responsabilité du fait des produits défectueux.
Sur renvoi de Cassation, et par arrêt du 11 avril 2019, la Cour d’Appel de LYON a donc retenu le principe la responsabilité de la société Monsanto sur le fondement de ce texte.
Sachant que le 10 Août 2018, un jury américain a condamné Monsanto, actuellement propriété de Bayer, à payer 289 millions de dollars (ramenés à 78 millions) de dommages et intérêts à un jardinier atteint de cancer pour ne pas avoir informé de la dangerosité de son herbicide, au motif que ce dernier aurait “contribué” à sa maladie. (On peut penser que ce seront surtout ses héritiers qui en bénéficieront puisque ses médecins lui donneraient moins de deux ans à vivre…)